Epinglés ! présente les découvertes des bibliothécaires et des lecteurs, des livres récents ou plus anciens, parfois méconnus, et qui méritent un coup de projecteur.
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Antonio Porchia a vécu au 20e siècle en Argentine. Ses Voces (Voix), comme il les appelle, sont l’œuvre de toute une vie ; il n’en a écrit qu’un peu plus d’un millier, joliment réunies dans l’édition parue en 2013 chez Érès, dans la collection Po&Psy.
Un millier de Voces et toute une vie pour les écrire, ces courtes phrases si denses de poésie et en même temps épurées jusqu’à atteindre la simplicité de l’oralité.
Qu’on ne dise jamais que j’écris des aphorismes. Je me sentirais humilié. (A.P.)
Parce que la poésie n’est pas seulement de belles figures de style, du rythme et de la versification… Avec Porchia, nous arrivons à une forme légère où l’on a l’impression qu’il a travaillé afin d’éliminer tous les mots inutiles et d’atteindre la pure beauté du langage. Une sorte de guide de sens, et donc de vie.
Aller tout droit écourte les distances et aussi la vie. (A.P.)
Les Voix voyageront jusqu’en France grâce à Roger Caillois qui les découvrit par hasard dans une version éditée à compte d’auteur. Le recueil circula dans le réseau des bibliothèques municipales d’Argentine où il trouva un public fasciné par les Voix au point de les recopier à la main et de les faire circuler.
Celui qui approche ses yeux des étoiles, il s’éloigne de ses yeux d’une distance infinie. (A.P.)
Roger Caillois, traducteur-admirateur, dira : « J’échangerais contre ces lignes tout ce que j’ai écrit ». Son œuvre rencontra l’admiration de poètes comme Henry Miller — qui l’ajoutera parmi les 100 livres qu’il faut avoir dans une bibliothèque idéale —, Roberto Juarroz, André Breton.
Roberto Juarroz, dans une postface à l’édition de 1979 des Voces, écrit :
[…] L’antithèse, l’opposition, la contradiction et le paradoxe conduisent alors à renoncer à toute possible explication de fond et à la conviction que l’absurde est une autre forme du sens, peut-être la seule. C’est pourquoi la plus grande profondeur s’oppose au discours. […]
Antonio Porchia fut invité à la radio où il pu lire des Voces qui attirèrent un public fidèle. Pour les curieux, on peut en écouter quelques-unes ici, en espagnol : http://www.antonioporchia.com.ar/nueva/videos.php.
Je vous invite à faire un petit jeu : ouvrez ce livre au hasard, lisez la Voix et faites là retentir en vous. Goûtez les mots pour quelques instants, sans chercher un sens. Moment de plénitude assuré !
Simona, bibliothécaire
Vérifiez la disponibilité en bibliothèque :
Voix réunies, Antonio Porchia (Érès, 2013).