Epinglés ! présente les découvertes des bibliothécaires et des lecteurs, des livres récents ou plus anciens, parfois méconnus, et qui méritent un coup de projecteur.
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Fille de parents cambrioleurs toujours en cavale, Clémence vit seule dans un château abandonné autrefois pillé par ses géniteurs, spécialisés dans le vol d’œuvres d’art. Son unique compagnie, c’est Oscar, un fantôme bedonnant amateur de bonne chère et d’associations culinaires audacieuses (mais plus ou moins réussies).
Clémence fréquente un collège gris, banal, semblable à mille autres, où son étrangeté se fond dans la médiocrité ambiante, passant presque inaperçue… contrairement à ses réparties, souvent récompensées par un déluge d’heures de colle. Mais l’ambiance change avec l’arrivée de Simon. Le collège entier s’égaye, fasciné par ce nouveau venu peu ordinaire. Les filles se pâment et en tombent toutes amoureuses ; les professeurs et le directeur lui-même s’extasient.
Le corps constellé de taches de couleur, Simon a en effet des allures de tableau vivant, comme si un grand peintre avait exécuté sur lui son chef-d’œuvre. Une question que personne ne se pose taraude pourtant Clémence : d’où viennent ces couleurs si somptueuses et si changeantes, chaque jour plus présentes ?
Puisque Simon refuse de répondre, la jeune fille décide de découvrir la vérité par elle-même. Et à force d’observer les faits et gestes du « garçon arc-en-ciel », un jour, enfin, une petite tache rouge à pois ivoire la met sur la piste ; elle vient d’apparaître alors que Simon s’est cogné sur le dos d’une chaise…
Quel curieux livre que ce court roman de Martin Page, traitant de la maltraitance sous un angle inédit. La douleur de Simon, enfant battu, y est sublimée, métamorphosée en quelque chose de beau ; des coups assénés par ses parents naissent une forme d’art, une façon pour le jeune homme d’exister aux yeux des autres… mais pour combien de temps encore ?
Avec cette histoire, Martin Page réussit un tour de force : injecter de la fantaisie et de l’humour dans un texte qui aborde un sujet grave sans que, pour autant, cela n’étouffe l’émotion qu’il peut susciter. Une émotion un peu étrange d’ailleurs, rendue telle par la dimension fantastico-rocambolesque greffée à l’histoire, pleine de ces charmantes bizarreries propres à l’univers poétique et décalé de l’auteur.
Au final, un texte doux-amer au petit goût de vengeance, à lire dès 9 ans.
Mélanie, bibliothécaire
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Le garçon de toutes les couleurs, Martin Page (École des loisirs, 2007).